Fondements théoriques

Le projet ERES s’appuie sur les recherches des dernières décennies qui nous renseignent sur le fonctionnement des jeunes à l’école et sur ce qui les motive à apprendre, à s’engager dans leurs études, à persévérer et ultimement à réussir. Trois cadres théoriques ont guidé nos travaux: la théorie de l’autodétermination, la théorie de buts motivationnels et la théorie des buts d’accomplissement.

 

La théorie de l’autodétermination (Deci & Ryan, 2002) postule qu’un élève qui s’engage dans une activité spontanément et par choix est motivé de façon autodéterminée. Une motivation non autodéterminée impliquerait au contraire la réalisation d’une activité dans le but de répondre à une pression, qu’elle soit externe ou qu’elle provienne de la personne elle-même. Cette théorie permet donc de distinguer différents types de motivation pouvant varier sur un continuum allant d’une motivation intrinsèque (« pratique d’une activité pour le plaisir et la satisfaction que l’on en retire » ), à une motivation extrinsèque (engagement dans des tâches jugées importantes pour atteindre des buts personnels), à une absence de motivation. La motivation serait influencée par la façon dont notre environnement social répond à trois besoins psychologiques fondamentaux : les besoins de compétence, d’autonomie et de proximité sociale. Si l’environnement éducatif répond à ces trois besoins fondamentaux, les chances sont élevées que les élèves soient motivés de façon autodéterminée, s’engagent dans leurs études et réussissent.

 

S’inscrivant dans cette orientation, la théorie des buts motivationnels (Connell & Wellborn, 1991 ; Larose, 2005) suggère que pour répondre aux besoins de compétence du jeune, celui-ci devrait être exposé à un milieu éducatif caractérisé par une structure. Un cadre de fonctionnement clair dans une classe, qui offre la possibilité au jeune de relever des défis à sa mesure et de recevoir des rétroactions qui l’orientent dans son cheminement, répond à ce besoin de compétence. Le besoin d’autonomie sera considéré lorsque le milieu permet au jeune de prendre certaines décisions, d’exercer son pouvoir de choisir donc dans un environnement encourageant la prise d’initiative, proposant des options tout en expliquant la valeur de ce qui est demandé. Un tel environnement se caractérise par un soutien à l’autonomie. Le besoin d’être soutenu et intégré socialement est considéré lorsque l’environnement éducatif expose le jeune à des relations de qualité, dans lesquelles les adultes s’engagent et s’impliquent au point de vue affectif. La présence d’engagement s’exprimant à travers un investissement de temps et la présence de comportements chaleureux et empathiques des adultes sont garantes de ce besoin.

 

La théorie des buts d’accomplissement (Elliot & Dweck, 2005), qui découle des recherches en motivation, stipule qu’un jeune qui désire développer ses habiletés et acquérir de nouvelles connaissances poursuit des buts d’apprentissage (ex. : un jeune qui veut apprendre de ses erreurs). En contrepartie, un jeune qui est habité par le désir de performer, de surpasser les autres et d’être reconnu comme étant le meilleur poursuivrait des buts de performance (ex. : un jeune qui désire démontrer aux autres sa supériorité). L’environnement pédagogique, selon son organisation, peut contribuer à la poursuite de ces buts. Des pratiques pédagogiques orientées vers des situations d’apprentissage diversifiées et stimulantes, vers la valorisation de l’effort et de l’autonomie de l’élève et la reconnaissance de l’erreur comme une source d’apprentissage seraient cohérentes avec la poursuite de buts de maîtrise. Par contre, les pratiques pédagogiques axées sur les buts de performance consisteraient à regrouper les élèves en fonction de leurs habiletés, valoriser ceux qui réussissent le mieux, utiliser des situations d’évaluation qui incitent les élèves à se comparer entre eux. Des pratiques orientées vers des buts de maîtrise favoriseraient les sentiments d’efficacité et la persévérance des jeunes alors qu’une approche pédagogique qui prioriserait les pratiques axées sur les buts de performance influencerait négativement la motivation et la réussite scolaires des élèves. Toutefois, il faut préciser que pour certains jeunes, aller à l’école à la fois pour apprendre et pour performer favoriserait la persévérance et l’obtention de bons résultats scolaire alors que pour d’autres, viser la performance serait plus générateur d’anxiété et de comportements d’évitement.

 

En somme, ces trois cadres conceptuels reconnus dans la littérature scientifique sur la motivation permettent de mieux comprendre les processus sous-jacents à la motivation scolaire. Dans la cadre du projet ERES, nous stipulons qu’un jeune exposé à un environnement éducatif, qui prend en compte ses besoins de compétence, d’autonomie et de soutien en lui proposant des apprentissages dans un cadre structuré, soutenant, chaleureux et qui favorise la prise de décisions, contribuera au maintien d’une motivation autodéterminée. De plus, si le contexte de classe offre à l’élève le choix d’effectuer des tâches qui lui posent un défi personnel et que ce dernier aime apprendre et progresser, l’adéquation entre le climat de classe et ce qui motive l’élève favorisera le maintien de sa motivation intrinsèque. Ultimement, l’élève motivé intrinsèquement, devrait s’engager dans ses études, réussir et persévérer.

 

Références

 

Connell, J. P. et J. G. Wellborn (1991). « Competence, Autonomy, and Relatedness : A Motivational Analysis of Self-System Processes ». Dans Gunnar, M. R. et L. A. Sroufe (eds.). Self Processes and Development: The Minnesota Symposia on Child Psychology. Hillsdale :Lawrence Erlbaum.

 

Larose, S. et G. M. Tarabulsy (2005). « Academically At-Risk Students ». Dans DuBois, D. L.et M. J. Karcher (eds.). Handbook of Youth Mentoring. New York: Sage Publications.

 

Sarrazin, P., Tessier, D. et D. Trouilloud (2006). « Climat motivationnel instauré par l’enseignant et implication des élèves en classe : l’état des recherches ». Revue française de pédagogie, 157, 147-177.

 

Vallerand, R.J. et E.E. Thill (1993) Introduction à la psychologie de la motivation. Montréal : Éditions Études vivantes